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TIME TABLE STORY Une brève histoire de calendriers

QUELLE UTILITÉ D’AVOIR LA MONTRE LA PLUS PRÉCISE SI ELLE N’EST PAS CAPABLE D’AFFICHER CORRECTEMENT LA DATE ? À QUESTION IDIOTE, RÉPONSE COMPLEXE QUI TARAUDE LES HORLOGERS DEPUIS BIENTÔT 200 ANS !

Une journée compte 24h, mais une année ne compte pas toujours 365 jours, ni 30 jours par mois. Pourquoi ? Parce que la rotation Terre – Soleil se fait sur 365, 24 jours. Et c’est ce 0,24 qui, tous les quatre ans, provoque l’adjonction d’un jour intercalaire, le fameux 29 février. En théorie, les choses sont donc simples : la Terre prend tous les ans un quart de jour de retard donc, tous les quatre ans, l’on ajoute un jour au calendrier. Ce tour de passe-passe astronomique dure depuis le XVIe siècle. Mais les horlogers, eux, n’aime ni les tours de passe-passe ni l’imprécision. Et c’est ici que les ennuis horlo-mécaniques commencent.

 

BON AN MAL AN

L’immense majorité des calendriers résout ce problème avec un seul disque de date qui tourne sur 31 jours. Traduction : c’est au propriétaire de corriger lui-même son garde-temps. À lui, chaque fin de mois, de passer manuellement au mois suivant lorsque celui qui se termine ne compte pas 31 jours. Ces calendriers sont dits « simples ».


Patek Philippe n’entendit pas les choses de la sorte. En 1996, la manufacture genevoise breveta un astucieux compromis : le calendrier (ou quantième) annuel. Il prend automatiquement en compte les mois de 30 et 31 jours. Il ne doit donc être ajusté qu’une fois par an, à la fin du mois de février. Le 20 janvier 2014, e brevet est tombé dans le domaine public et équipe depuis d’autres garde-temps, notamment chez Zenith.

 

 

GARDER SA DATE À JOUR

Tous ces développements ne concernent que la date. En d’autres termes, ni le jour, ni le mois. Les calendriers complets sont nés de ce constat et proposent tout ou partie de ces mentions. Rolex, avec sa bien nommée Day-Date, affiche ainsi le jour et la date depuis 1956. IWC ajoute le mois sur sa nouvelle Portugieser, tout comme Patek Philippe sur sa Nautilus 5726A ou Baume & Mercier sur ses Classima. Pour tous, la seule correction requise sera encore au mois de février. Le calendrier complet s’avère fort utile au quotidien mais bien des clients n’apprécient pas de voir les jour et mois exprimés en anglais sur la  quasi-totalité de ces modèles. Autre détail qui en agace certain : l’affichage également à l’anglaise de ce calendrier avec, dans l’ordre, les jour, mois, date (« Monday, September 1st », au lieu de lundi 1erseptembre). En Europe, berceau francophone de l’horlogerie, certaines dents grincent.

 

LA QUÊTE DU PERPÉTUEL

En haute horlogerie, ces solutions qui font appel à la correction manuelle sont peu prisées. Toute l’ingéniosité est de concevoir des garde-temps capables de calculer eux-mêmes l’ajout de ce 29 février si dérangeant. En pratique, l’enjeu n’est pas si évident : une roue bien précise, celle des années bissextiles, doit faire un tour en quatre ans. Sa vitesse de rotation est donc d’une incommensurable lenteur. Or, en quatre ans, les accidents de la vie peuvent venir bousculer ces fragiles mouvements et les erreurs de manipulations sont fréquentes. Un calendrier perpétuel est un objet d’art horloger, précis mais fragile, bijou qui possède une « mémoire » mécanique de 1461 jours, soit quatre ans. Bien entre- tenus, toutes leurs indications resteront toute- fois correctes jusqu’en l’an 2100, tenant compte des mois de 28, 29, 30 et 31 jours.

 

PERPÉTUEL À ÉCHÉANCE

Un calendrier perpétuel à corriger en 2100 ? Il n’est donc pas perpétuel ! La faute en revient à notre calendrier grégorien qui a déidé que cette année-là, comme trois siècles sur quatre, serait non bissextile. Le motif est toujours le même : un énième rattrapage solaire pour conserver l’année calendaire la plus juste possible.

 

Il n’en fallait pas plus aux horlogerspour se mettre un nouveau défi en tête. Décidément plus forts en astronomie appliquée qu’en français, ils inventèrent le calendrier séculaire, plus juste que le calendrier pourtant dit perpétuel ! Il existe ainsi de très rares « quantièmes séculaires » tenant compte de cette particularité et dépassant largement 2100 sans avoir à être réglés. Point final ? Pas vraiment.

 

Car, au-delà du pur affichage du calendrier, certains horlogers se sont attaqués à l’affichage de la Lune et de ses différentes phases. C’est un affichage différent du trio jour, date, mois mais qui, en horlogerie, fonctionne en association avec les quantièmes perpétuels. Ainsi, au printemps 2015, l’horloger indépendant Andreas Strehler est entré au Guinness Book des records avec sa Sauterelle à Lune perpétuelle. La pièce affiche une phase de Lune qui ne déviera cette fois que d’un jour en deux millions d’années. Qui dit mieux ?

 

UN OBJET D’ART PRÉCIS MAIS FRAGILE

GUERRE DE RELIGIONS

Tout se terminerait ainsi si l’histoire de l’humanité n’était pas jalonnée non pas d’un mais d’innombrables calendriers. Si le grégorien est un standard universel, les calendriers religieux posent d’autres défis aux horlogers. Le calendrier musulman ou hégirien (hijri) est lunaire, fondé sur une année de 12 mois lunaires de 29 à 30 jours chacun. Une année hégirienne compte 354 ou 355 jours et, selon son calendrier, nous sommes actuellement en 1437. Presque une broutille comparée au calendrier chinois qui, lui, ne compte pas moins de sept mois intercalaires ! Devant la complexité mécanique comme arithmétique de ces calendriers, très peu d’horlogers ont conçu des garde-temps qui les affichent. Blancpain a toutefois réussi à dompter le calendrier chinois dans un somptueux modèle Villeret, l’un des plus récents et remarquables. Patek Philippe, dans son célèbre calibre 89, a produit le seul et unique mouvement au monde capable de prédire la date variable de Pâques. Plus récemment, c’est l’horloger russe Konstantin Chaykin qui a remis au goût du jour les montres religieuses. L’homme a présenté ces dernières années plusieurs montres à complication propres aux grandes religions. Sa montre à calendrier orthodoxe a notamment été achetée par le patriarche Cyril en personne.

 

En France, enfin, un homme s’attache depuis bien longtemps aux montres à calendrier religieux : Alain Silberstein. À ce jour, dans le micro-cosme de la montre confessionnelle, Silberstein est une référence. Dans les années 1990, il créa le premier QP hébraïque, avec l’horloger Svend Andersen. Il travaille encore aujourd’hui à de nombreux projets d’horlogerie confessionnelle.

 

PLUS

HISTOIRE

Le calendrier grégorien, le plus répandu sur Terre, fut adopté le 15 octobre 1582, soit... le lendemain du jeudi 4 octobre de la même année ! C’est précisément ce saut de 11 jours en 24h qui, couplé au 29 février intercalaire, permit de régler définitivement son compte aux décalages induits par les systèmes précédemment en vigueur, principalement le calendrier julien non réformé. Notre système grégorien n’est certes pas parfait, mais il n’offre une désynchronisation que de 3 jours tous les 10.000 ans. On s’en contentera donc..

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